L’as de trefle qui pique ton cœur feat. Angus
@ Wendy Cahill
myself britannique
Au 777,
A ces heures indécentes où la nuit est toujours et le jour pas encore,En dehors de ces murs le manteau sombre s’éclaircissait laissant peu à peu apparaître cette ligne intangible derrière laquelle bientôt le soleil commencerait paresseusement à poindre. Dans les appartements, les maisons comme les voiliers, les rêves périraient sous la stridulation d’un impudent réveil. Les mines froissées apparaîtraient alors de dessous des couettes qui se savaient déjà délaissées . Dans quelques instants les enfants avaleraient leurs chocolats et céréales devant ces parents qui leur feraient réciter leurs leçons. Des amants glousseraient et retarderaient l’instant pourtant inéluctable de se séparer pour mieux se retrouver ensuite. Oui, dehors, la vie reprendrait ses droits.
Mais pas ici. Pas entre ces murs où tout rappel à Chronos était tout bonnement banni. Ici ni horloge ni même antique clepsydre. Parce que tous au casino le savaient : le temps était leur ennemi. Ceux qui regardaient leur montre se souvenaient avoir un conjoint à rejoindre, des enfants à conduire à l’école, un patron qui lui ne badinait pas avec la ponctualité et même un chien qui se chargerait de leur faire payer l’oubli de sa ballade en déposant au milieu du salon ce qu’ils auraient du faire au dog park . Ceux qui retrouveraient le tic tac de l’horloge oublieraient le murmure de ces jeux de cartes que l’on bat pour mieux les distribuer. Le casino vendait du rêve à ses clients, les poussant sans cesse à dépenser plus en leur susurrant que lorsqu’ils gagneraient ils seront enfin heureux. Plus jamais de réveil à endurer ! Fini les patrons capricieux et dédaigneux ! C’était sur ça que les Cahill avaient si bien capitalisé que tous en étaient devenus riches à millions. C’était bien les seuls, d’ailleurs. Du malheur des clients eux avaient bâti leur bonheur et la partie légale de leur fortune. Mais le temps, ce vilain chien galeux, venait toujours tout gâcher.
Le temps. Neuf mois. L’absence d’une vie. L’impatience d’une autre. Le plus monumental des gâchis ? Peut-être bien. Ou peut-être pas. Dans un cas comme dans l’autre cela ne la regardait pas et ne l’intéressait en rien. Ses habituelles Aviators vissées à son nez aussi fin qu’il était petit, le rouge profond habillant ses lèvres et la plus provocatrice des cigarettes reposant au bout de ses doigts, Miss C. venait de faire son entrée dans la cour des grands. Des très grands même à en juger par les voitures qui ne cessaient d’arriver et de partir, ostentatoires et onéreuses ballerines aux tutus en chrome et que des cavaliers voituriers entraînaient dans une sarabande étrange mais curieusement pas dénuée d’élégance.
« Impressionnée ?»
Les mots étaient légers et le sourire mutin mais derrière le bleu des yeux de l’homme c’était l’acier qui luisait. Et si la main qui vint se poser à la taille de sa complice était délicate elle pouvait tout aussi bien, en une fraction de secondes, redevenir la plus meurtrière d’entres toutes. Le rire de la brune qui tinta dans l’air avant que ses prunelles ambrées ne se dévoilent un bien court instant.
« Pas le moins du monde. Sinon tu ne m’aurais jamais emmenée.»
Miss C. marquait évidemment, et pour le plus grand plaisir de son mentor, le point. C’était peut-être cela en fin de comptes, plus encore que ses talents d’empoisonneurs qui l’avait convaincu et sans doute même plus conquis qu’il ne pouvait se permettre de l’admettre. Les histoires d’amour ne finissent que rarement bien mais dans leurs cas précis elles se terminaient immanquablement dans une tombe.
« Peux-tu me rappeler pourquoi tu viens ce soir et ici trahir celle qu’hier tu me présentais comme ta filleule adorée ?»
L’emphase portée sur le dernier des mots n’avait pas échappée à celui qui, se gardant bien de le relever, peina à réprimer un sourire. Ce n’était pas le moment et ne le serait jamais. La clameur étourdissante du lobby commençait déjà à s’éteindre dans leur sillage quand il avait daigné répondre.
« Si ce n’avait pas été nous d’autres auraient accepté le contrat.
— Maintenant que tu en parles : depuis quand nous occupons-nous de ce genre de basses besognes ?»
Il connaissait la répugnance de la française à s’occuper de ces tâches qui, en effet, ne rentraient que très exceptionnellement dans leurs attributions. Épier leur cible pour mieux apprendre à la connaître était une chose. C’étaient les prémisses d’une chasse où le moindre détail importait. Depuis ces habitudes si ancrées à leur quotidien que les gens ne pouvaient plus même fonctionner autrement. Lui qui avait pénétré dans tant d’intimités qu’il y était devenu hermétique savait que la plupart des gens n’étaient jamais que des robots qui s’ignoraient. Un peu comme celui qui ne tarderait pas à faire son entrée.
« Voyons voir si tu as bien fait tes devoirs.
— Me demande celui qui m’a filé le train, cloné mon téléphone et espionné mon ordinateur pour s’assurer que je ne bâillais pas aux corneilles ?»
Ainsi donc elle l’avait remarqué ? Agréablement surpris, peut-être même bien fier, il n’en avait rien laissé paraître et écouté Miss C. lui narrer comme elle l’eut fait d’un conte de fées la vie de chacun des protagonistes de cette ridiculement banale pièce. Rien que le ballet ordinaire de ces êtres qui clament si fort ne pas avoir de coeur quand en leurs seins et poitrails ceux-ci battent la plus endiablée des chamades. Rien que les tribulations de corps qui se pensent libertins quand ils ne se languissent que d’un seul autre. L’amour qui se rejette avec la violence que seuls sont qui en sont prisonniers connaissent. La pathétique comédie humaine en somme.
« Cependant permets que j’en revienne à ma question de tantôt : pourquoi nous ? Nous lui coûtons une véritable fortune alors qu’il y a pléthores de hackers, arnaqueurs et autres ambitieux qui au sein même de ses propres rangs ne demanderaient pas mieux que de lui rendre ce menu service.
— Pourquoi t’adresser à de vulgaires humains quand tu as les moyens de t’offrir les services de Dieu ?
— Maintenant que tu as fait jouir ta vanité pourrais-je avoir la version moins poétique mais assurément plus prosaïque des choses ?
— Personne n’a envie de manger là où il a chié.»
Miss C. s’était abstenue de toute réponse mais avait hoché la tête. Les propos étaient des plus fleuris, trop pour la femme amoureuses des beaux mots comme elle l’était des poisons, mais elle en saisissait l’essence. Angus aurait pris trop de risques en confiant ces recherches à des ambitieux plutôt qu’à des êtres qui, comme eux, n’avaient plus rien à prouver à personne.
« Pile à l’heure.»
Angus Cahill, s’il savait soigner ses entrées dans un monde qu’Hades aurait pu parier qu’il détestait, ne se permettait jamais même la plus infinitésimale des secondes de retard dès lors qu’il s’agissait des affaires de sa famille. Et encore moins lorsque, comme ce soir, il s’agissait des siennes. Un sourire flagorneur qu’il offrait aux uns pour mieux le denier aux autres. Des mots qu’il semait aux vents pour flatter l’orgueil de ceux dont il se contrefichait éperdument et le silence de la confiance qu’il leur offrit à eux tandis qu’il ne passait à leur hauteur que pour les inviter à lui emboîter le pas jusqu’à ce bureau où ils pénètrent toujours dans le plus religieux des silences et dont Angus prit soin de lui même refermer les portes.
Pendant le temps que dura leur entretien aucun son, ou presque, ne filtra et personne ne songea même à venir troubler ce silence. Pas même après que le bar ait reçu un appel demandant à ce que des rafraîchissements leur soient montés. Le chariot avait été déposé devant une porte où le chasseur avait pris grand soin de ne pas frapper. Alors qu’enfin le tandem ressortait du bureau les mines toujours aussi impassibles pour ne pas dire un poil blasées le sourcil déjà arqué de Miss C. s’était un peu plus rehaussé en entendant des bruits de bris de glace. Un miroir, assurément. La si bonne bouteille de whisky très certainement aussi.
« Dommage. C’était un très bon cru.
— Je trouve qu’il le prend plutôt bien à vrai dire.
— Puis-je alors prier pour ne jamais avoir à être témoin de ses pires colères ? »
Hades avait ri légèrement mais en son for intérieur l’homme savait que d’ici quelques temps l’héritier Cahill risquait fort d’être … quel est le mot le plus adéquat pour décrire ce qui va au-delà même de la plus sombre des colères ? Ah oui ! L’homme se souvenait.
L’Apocalypse
Au condominium,
A l’heure où le jour lutte mais où les premiers filaments de ténèbres commencent à s’étirer à l’horizon,
« Bonsoir Miss Langdon !»
L’air toujours si pincé de l’intéressée s’était immédiatement radouci lorsque la femme en tenue de portier l’avait accueillie avec sa bonhomie et sincère bienveillance. Wendy aimait bien cette femme que trop d’occupants réduisaient à son uniforme et écrasaient de leur dédain et mépris de classes évident. Pourtant si, comme elle, ces paons s’étaient donnés la peine d’aller au-delà du miroir toujours déformant des apparences alors sans doute auraient-ils pu comprendre que quand bien même ils se seraient chacun retrouvés tour à tour seul dans une pièce avec la femme en uniforme elle aurait à chaque fois été la plus intelligente Miranda, puisque tel était son prénom, était docteure en droit mais le cabinet où elle travaillait avait été démantelé suite aux malversations de l’associé principal. Elle avait évite la prison mais son nom avait été souillé. Alors, en attendant que le scandale se tasse et pour payer les factures du quotidien comme de ses jumeaux en dernière année avant la faculté elle avait pris cette place. Guère reluisant pour certains mais cela permettait à sa famille de vivre décemment.
« Comment vont Nate et Dan ? Ont-ils déjà reçu des réponses des universités ?
— Pas encore Miss Langdon mais ils sont impatients. Et bien plus sereins que je ne le suis.»
Des banalités échangées avec la distance qui convenait mais avec toute cette humanité que Miranda appréciait à sa juste valeur et qu’elle louait auprès des siens quand enfin ses si longues journées prenaient fin. «La valeur n’attend pas le nombre des années !» le meilleur des exemples en était sûrement cette si jeune demoiselle qui venait tout juste d’emménager et qui était différente, elle. C’est sans doute pour cela que beaucoup des autres habitants ne l’aimaient pas. Mais Miranda le leur répétait toujours : Miss Langdon était quelqu’un de très bien !
« Oh Miss ! Avant que vous ne montiez !»
Les doigts de l’intéressée qui tremblaient alors qu’elle abaissait doucement à sa nuque l’arceau de son casque et offrant son plus serein regard à la femme n’en sentait pas moins le plus glacé des frissons remonter à son échine.
« Un monsieur est venu toute à l’heure.
— Un monsieur ? Mr Callaghan ?
— Non, répondait l’employée en secouant la tête comme si cette dernière eut été montée sur un ressort détraqué, Pas Monsieur Rhys !»
Le coeur qui loupait un battement avant que de se figer dans la douleur quand les mots s’étaient écoulés d’un souffle ténu et de ses lèvres subitement comme sèches.
« Sauriez-vous me le décrire ? A-t-il demandé quand je rentrais ou peut-être même a-t-il laissé un message à mon intention ?
— Il avait dans ses bras une gerbe de fleurs mais quand William a proposé de vous les remettre à votre retour l’homme a eu un drôle de sourire puis a dit que ce n’était pas la peine.
— Il est donc reparti avec ? Sans même me laisser le moindre mot ?»
Le coeur qui se serrait à s’en tordre puis se relâchait mais refusait obstinément de reprendre la course normalement régulière de ses battements. Le balancier du métronome s’affolait tant que Wendy sentit une impatience à sa jambe et un tressaillement à sa paupière. Les mots de la portière qui ne lui parvenaient plus que par notes esseulées et isolées, pauvres syllabes trop économes de détails mais qui en révélaient bien trop aussi. Grand. Blond tirant sur le vénitien. Des yeux d’un bleu si froid que… Pas la peine d’ajouter quoique ce soit. Wendy savait. Le portrait que Miranda imaginait sommaire était si précis que même les yeux fermés dans cet ascenseur la blonde pouvait voir le visage de l’homme danser sur l’écran de ses rétines.
«Angus…»
Ainsi donc il l’avait retrouvée. Déjà ? Enfin, plus tôt. Wendy aurait presque pu être déçue qu’il ait mis tant de temps à savoir où se cachait la souris qu’il avait si bien trahie. La femme qui avait payé sa candeur lorsqu’elle avait refusé de le dénoncer lui qui n’avait laissé le goût de ses baisers sur les lèvres de la rêveuse que pour mieux l’envoyer l’oublier au fond d’une cellule et sans même passer par la case départ ni recevoir ses vingt milles. Idiote ! Ah ça oui elle l’avait été ! Rien que le souvenir de ces instants ravivaient en son âme les pires des rancœurs. Celles qui grouillaient sous sa peau à lui donner des envies de se l’arracher ! Celles qui l’avaient nourrie d’envie de vengeance pendant chacune de ces 23 668 200 secondes qu’elle avait passées à l’ombre de son sadisme.
cling
Le bruit sourd et le sursaut de la cabine, comme un hoquet, qui surprenait toujours la première fois. La carte magnétique qu’elle s’agaça de mettre autant de temps à trouver au fond de son sac. Le rayon bleuté du laser qui scannait les données et, dans un sifflement discret, lui ouvrait les portes de son royaume assiégé. Elle n’avait pas même ralenti son pas mais son œil, lui, les avait vues. Ces fleurs qui n’étaient pas là à son départ mais trônait maintenant sur la table à manger du salon principal. Des fuchsias. Rouges, cela la fit sourire. Les gens seraient étonnés de l’apprendre mais ce fut Angus qui, après une journée passée à panser leurs amis à hautes jambes, l’avait emmenée dans sa serre préférée et lui avait appris les rudiments du langage des plantes. De celles-ci plus que toute autre.
« Tu me décevrais presque !»
Quatre mots qu’elle rit avec une sincérité qui la surprit elle-même. Puis son regard qui était allé chercher celui de cet homme dont elle voyait la silhouette si familière sortir de l’ombre où elle était demeurée tapie pour mieux venir s’offrir à une lumière qui lui allait malheureusement fort bien. Elle n’avait pas esquissé le moindre geste ni même prononcé le moindre mot alors qu’elle faisait volte face et venait à lui de son pas lent. D’ordinaire il l’était car l’assurance l’habitait. Ce soir là il l’était car l’appréhension le retenait. Quand elle fut à sa hauteur elle lui avait souri comme il lui était arrivé de le faire par le passé. Sa main s’était approchée de sa joue sans l’effleurer une seule seconde.
«Les fleurs sont sublimes. Je t’en remercie.»
Puis sa main était retombée presque lourdement le long de son corps. Juste le temps de se saisir de ce poignard qui ne la quittait jamais et qu’elle ancra à sa paume avant que de promptement le planter dans le mur et à quelques millimètres à peine de la tête de l’irlandais. Wendy n’avait pas voulu l’effrayer elle savait cela pour le moins impossible tant l’homme ne craignait rien. Elle n’avait pas voulu le blesser elle ne le haïssait pas même assez pour cela à vrai dire. La goute de sang qui n’en perla pas moins à la peau d’Angus elle la ramassa du bout de son ongle et la porta a ses lèvres avant de la faire disparaître d’un coup de langue agile.
«Mais pour neuf mois c’est un peu court niveau excuses. Alors puisque tu as su entrer j’imagine que tu sauras sortir ?»
Elle bouillonnait mais ne lui ferait pas le plaisir de le lui montrer. Elle souffrait mais préférerait crever que de l’admettre.
Angus ne méritait rien d’elle. Il avait perdu le droit à son meilleur quand il avait planté la graine du pire en son coeur. Il avait perdu le droit à son pire en refusant de lui offrir son meilleur à lui.
Angus ne méritait rien d’elle.
Mais au fond Wendy se demandait…
Et elle ?
Que méritait elle de lui ?
«Rien»
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@ Angus Cahill
43 absolaime RedFox. Anglaise
Le 777 bruissait d'activité. C'était un bruit continu, une rumeur de fond, un chant presque fantomatique. Les échos de vie qui se brisaient sur les arêtes tranchantes des faux espoirs. Le son joyeux des joueurs en veine pour mieux étouffer les sanglots amers de la déception. Marchand de rêves empoisonnés, voilà ce que Angus était à tout point de vue. Mais Angus s'en moquait. Ces hommes et ces femmes étaient les artisans de leurs propres destructions. Certes, il fournissait les outils, mais il ne pouvait pas être tenu responsable de l'usage qu'on en faisait. Personne ne les forçait à venir dépenser un argent qu'ils n'avaient pas toujours. Quelquefois, un veinard sortait du lot, empochait une joli somme... mais bien souvent, cette somme revenait renflouer les caisses bien dodues du casino, parfois le jour même, parfois quelques temps plus tard. En un sens, Angus méprisait ces gens qui étaient pourtant, une source de revenus pour lui et les siens. Il méprisait ceux qui se laissaient attirer par le chant des sirènes. Ce qui voulait dire, ironiquement, qu'il se méprisait aussi lorsqu'il cédait ses chimères-sirènes, lorsqu’il avait besoin de quelque chose pour maîtriser ses défauts, lorsqu'il mettait un genou à terre face à ses démons. Il détestait sa propre faiblesse. Mais ce jour-là, il était totalement aveugle et indifférent au spectacle qui se déroulait sous ses yeux, celui-là même qui parfois lui offrait une distraction agréable. Ce n'était pas ce qui l'intéressait, non. Il avait un rendez-vous des plus importants. Il allait enfin obtenir l'information qui lui manquait depuis quelques temps.
Neuf mois.
Les trois quart d'une année.
Trois saisons.
Une parenthèse dans l'espace d'une vie.
Une éternité pour celui qui attend.
Evidemment, il avait su qu'elle reviendrait. Qu'elle finirait par revenir à Oxford. Il ne lui avait manqué qu'à savoir quand, où et comment. Retrouver sa trace. La retrouver physiquement. Il oscillait encre hâte et colère profonde. Il avait fait appel aux meilleurs. L'argent n'était pas et n'avait jamais été un problème pour lui. Il aurait pu trouver moins cher, bien sûr, mais il n'avait pas envie de traiter avec un néophyte avide de se faire un nom et une réputation. Non, il n'avait pas envie de perdre son temps. Encore moins s'il avait du faire disparaître l'avide pour être sur qu'il tienne sa langue. Il n'avait pas peur de se salir les mains. Il n'avait juste pas envie de perdre plus de temps. Il avait donc fait appel aux meilleurs et il avait obtenu les réponses qu'il cherchait. Pour être parfaitement honnête, cela n'avait pas exactement ce qu'il espérait. Il s'était contenu du temps qu'Hades et Miss C. étaient dans son bureau, mais une fois seul, il avait laissé sa colère exploser et envoyé la bouteille de whisky se fracasser contre le miroir derrière son bureau. Malheureusement, le soulagement n'avait été que trop bref. Après avoir repris contenance, il avait quitté le casino pour rejoindre le lieu où elle se trouvait.
Il aurait pu s'y faire conduire. Personne ne lui aurait rien dit. Personne n'aurait bronché. Mais il avait préféré y aller de lui-même, en moto, même si cela signifiait de devoir se garer plus loin et terminer le chemin en marchant. Elle aurait assurément reconnu la vieille T120 dont Angus n'avait jamais pu se défaire. Cette moto était probablement l'une des seules possessions dont il se préoccupait réellement. Il s'était garé près d'un fleuriste, si bien qu'avant de rejoindre son but, il était entré dans la boutique et avait acheté un bouquet de fuchsias rouges. Une histoire entre eux. Une parenthèse qu'il n'avait pas forcément envie de voir se refermer. Le parfum des fleurs lui chatouillait agréablement les narines. Cela le ramenait à des souvenirs et une escapade dans des serres. Un jour hors du temps où il n'avait été que son Capitaine, son M’fhíorghrá, dans cette manière qu'il n'avait qu'avec elle, en de trop rares occasions. Il lui avait appris quelques mots du langage des fleurs. Il avait cueilli un fuchsia qu'il était venu glisser derrière son oreille avec un sourire.
La femme qui officiait en tant que portier lui avait indiqué que Miss Langdon n'était pas encore là. Angus s'était montré courtois et l'avait remerciée. Il était monté jusqu'à chez Eitan.
« Ah, cher cousin, dans quoi t'es-tu encore embarqué. »
Nul besoin d'attendre qu'on lui ouvre, il avait sa propre clé du royaume. Il avait refermé derrière lui, puis, il avait déposé les fleurs dans un vase, bien en vue, avant de s'installer dans l'ombre et patienter. Il pouvait attendre ainsi de longues heures. Il pouvait se montrer d'une patience à toute épreuve. Il avait largement eu le temps de jouer plusieurs scénarios dans sa tête, sans qu'aucun ne lui paraisse être celui qui se déroulerait dans un futur proche. Il avait beau se l'imaginer, il savait que Wendy, tout comme lui, ne se pliait que rarement à ce que l'on attendait d'elle. Il était sorti de l'ombre en entendant sa voix. Evidemment qu'elle avait deviné qu'il ne s'était pas contenté de lui laisser les fleurs. Il n'aurait pas pu agir ainsi. Il était resté là, dans la lumière à l'observer. Agacé de sentir que les battements de son cœur s'étaient légèrement accélérés. Il restait immobile ou peu s’en fallait. Elle s’était approchée et il avait senti sa peau se hérisser quand sa main était presque venue effleurer sa joue. C’était comme si des centaines de minuscules aiguilles s’étaient enfoncées dans sa peau et ses terminaisons nerveuses. Pourtant, c’était tout juste s’il avait cillé, maîtrisant toujours à la perfection la moindre de ses réactions. A part, peut-être, un léger tic qui était venu agiter ses lèvres. Le compliment – sur les fleurs – énoncé, la main était retombée, sans jamais avoir touché sa peau.
« Je me suis dit qu’elles te plairaient en les voyant. »
Qu’elles ramèneraient à son esprit quelques souvenirs hors du temps. D’un geste rapide et vif, elle avait sorti son poignard pour mieux le planter dans le mur, juste à quelques millimètres de sa tête, et le souffle du geste l’avait peut-être fait cligner des yeux. Guère plus. Il lui avait fallu quelques secondes pour sentir la brûlure piquante de l’entaille à sa joue. Elle l’avait légèrement égratigné. C’était le genre de douleur qui ressemblait à celle d’une entaille causée par un rasage un peu hâtif. Elle s’évanouissait déjà quand la jeune femme avait effleuré sa joue pour cueillir la perle carmine du bout du doigt, avant de la léger.
« Qu’est-ce qui te fait dire que ce sont l’intégralité des excuses ? »
Ce n’était pas ce qu’il avait voulu dire. Il avait dans l’intention de lui demander pourquoi elle croyait qu’il allait s’excuser. Il savait que son masque de froideur à lui disparaîtrait bien trop vite. Il sentait son sang bouillir et déjà le chaos rugissait sourdement sous son crâne.
« Il faut qu’on parle. »
Ce genre de phrases bien trop sentencieuses qu’il avait toujours détesté. Il aurait voulu dire tout un tas d’autres choses.
« Drôle d’idée de m’éviter en venant vivre chez mon cousin. »
Lui aussi il allait lui toucher deux mots. C’était pour cela qu’il s’était montré plutôt distant dernièrement. Angus ne savait pas s’il devait être déçu du comportement de son cousin ou non. Il l’avait fixée.
« Tu as quelque chose qui m’appartient et que j’aimerais récupérer. »
Et par « j'aimerai », il entendait plutôt « je veux ». Il ne comptait pas céder. Merde, il fallait qu’il récupère cette formule. Il arrivait au bout de ses réserves et il n’avait pas vraiment envie d’expérimenter le manque. C’était déjà suffisamment frustrant et se sentir autant sur la pente glissante n’améliorait pas vraiment son humeur. Il détestait avoir une telle faiblesse. Il avait deux faiblesses. Et elles étaient liées. Et leur cause était face à lui. Avec une nonchalance toute affectée, il avait ajusté le col de sa chemise.
« Je préfèrerais que cela se fasse de façon cordiale. Ensuite, libre à toi de faire ce que bon te sembleras. »
Sous le velours de son ton, il n’en restait pas moins un prédateur à l’affût. Ils étaient tous les deux des prédateurs en chasse. Et ils étaient le gibier l’un de l’autre. C’était l’une de ces histoires qui ne finiraient probablement pas bien. Ils le savaient. Ils le sentaient. Angus avait franchi une ligne. Wendy en avait fait de même. Ils étaient là, à s’observer comme deux loups se disputant un territoire.
Angus voulait… Il ne savait pas ce qu’il voulait. Se venger ? S’excuser ? L’embrasser ? L’étreindre ? Tout ça en même temps ? Il avait l’impression que la course du monde s’était suspendue à ces traits qu’il fixait pourtant durement. Des traits qu’il aurait pu esquisser les yeux fermés.
Neuf mois.
Elle lui avait manqué.
Putain de merde.
Elle le rendait faible.
Parfois, il avait envie de se rendre, aussi.
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June Mayfair aime ce message
@ Wendy Cahill
myself britannique
« Ne serait-ce pas plutôt à nous-mêmes que nous mentons le mieux ?»
La vérité ne tenait jamais, en réalité, qu’à si peu de choses. Mais jamais en ces mots qui ne sont jamais aussi agréables que lorsqu’ils parent de l’illusion du beau la laideur des faits. Car c’était bien ainsi qu’était leur réalité, non ? Il eut été enfantin et stupide d’aller imaginer l’inverse. Wendy avait laissé le plus glacé des frissons remonter à son échine tandis que, malgré sa raison mais selon les commandements de son coeur, elle s’en allait perdre son regard dans celui de son autre. son comme d’une certaine manière elle était sa. Son malheur. Sa malédiction. Mais à pouvaient ils réellement rêver d’autre eux qui avaient choisi de faire de leurs existences de perpétuelles fuites en avant ?
« Jamais. Nous ne nous étions jamais mentis, pas même par omission.»
La nostalgie qui étreignait si violemment son coeur qu’elle dut y apposer la main pour mieux l’empêcher de s’affoler devant ces souvenirs que Wendy maudit d’ainsi et aussi bien lui revenir. Ceux d’une nuit nichée au creux d’une nuit dans la ville des péchés comme si, déjà, ce qui allait devenir leur histoire était promise aux plus sombres des augures. Les néons d’un casino qui ne faisaient que plonger son visage à lui dans un halo de ténèbres. Le bruit de ces cartes que l’on battait à la table où ils s’étaient retrouvés seuls une fois tous les autres joueurs éliminés. Il lui confia ensuite et dans la chaleur d’un lit qu’il n’avait pas voulu la voir perdre. Elle lui avoua sans ciller qu’elle n’avait pas voulu gagner. Puis ils avaient ri de concert devant la mine stupéfaite de l’employée à qui ils avaient abandonné tous leurs gains. La partie n’avait jamais pris fin. Sans gagnant il n’y avait pas non plus de perdant.
« Il y avait des fuchsias. Dans la chambre où nous nous sommes a… la voix qui se suspendait et son regard qui chercha au fond de ses homologues la réponse à sa question. Un léger sourire et la voilà qui assumait Il y avait déjà des fuchsias dans cette chambre de Vegas où nous nous sommes aimés.»
Le mot était tombé, s’élevant dans l’air pour mieux y claquer comme un coup de tonnerre qui se serait drapé de douceur. Le mot était tombé parce que, comme elle l’avait si bien dit, ils ne s’étaient jamais menti. Et si lui avait rompu leur tacite serment de ne jamais d’accabler de ces mensonges dont ils aimaient à étouffer les autres Wendy ne voulait pas s’abaisser ainsi. Sa loyauté et son honnêteté étaient tout ce qu’elle avait de beau et de pur à offrir aux gens qui lui étaient chers. Angus étaient, évidemment, de ceux-là. Après tout l’on ne peut jamais bien haïr que ce l’on a que trop bien aimé.
« J’ai toujours voulu croire que tu t’en souvenais toi aussi et que c’était pour cela que ce jour-là, à la serre, tu avais voulu m’en conter les mots cachés.»
Oh que le ton était doux ! Oh que les mots étaient tendres ! Mais ne pas lui mentir c’était aussi accepter de sentir son coeur saigner les plus amères de ses larmes devant une histoire qui n’avait été gâchée que par la vanité de l’un et la bêtise de l’autre. Se souvenir pour ne plus jamais recommencer… Oui. Mais de quoi parlait on ? De la faute originelle ? Ou de ce pieu acéré et mouillé d’acide qu’Angus n’avait pas hésité une seconde à planter en son coeur ? Et tant qu’à parler d’erreur alors quid de celle que Wendy sentait trop bien arriver pour ne pas s’en alarmer. Un regard qu’elle détourna enfin tout en immisçant entre leurs deux corps la plus salutaire des distances. Car, elle de le jura une fois encore : puisque l’enfer est dans la répétition alors jamais l’irlandais aux yeux trop clairs ne deviendrait le sien. !
« Je sais, pour ton père. Disons qu’il m’en a parlé à mots voilés comme il le fait toujours dès lors qu’il parle de toi avait ri avec bien plus de légèreté cette fois celle qui revenait à l’homme pour mieux prendre sa main et la poser à l’endroit où ses doigts pourraient glisser sur l’encre pâle qui se faisait écho de cette autre qu’Angus n’avait pu s’empêcher d’effleurer à sa propre peau quelques instants plus tôt Il semblerait que ton père soit un fin observateur et bien plus malin que nous deux réunis. Et son avis sur la question est, disons, des plus arrêtées.»
C’était encore bien là un doux euphémisme. « sales gosses» « idiots toutes catégories » « crétins pas finis » étaient des mots doux au florilège de ceux dont il l’avaient gratifiée lorsque, apprenant sa mésaventure, il était venue la trouver en prison et avant même que la date de sa comparution ne soit fixée. Il lui avait demandé si elle avait trahi les intérêts de son fils ou de leur famille, elle avait répondu par la négative. Il lui avait demandé une seconde fois si sa famille était, d’une manière ou l’autre, responsable de son arrestation et là encore elle avait nié. Quand pour la troisième fois elle avait repoussé sa question le patriarche avait souri. Il lui avait proposé l’aide gracieuse de ses avocats mais là aussi elle avait refusé. Cela eut inévitablement éveillé les soupçons de la police et s’il s’en était trouvé un d’adroit dans le lot alors la famille aurait pu être compromise. Wendy ne voulait pas cela. Elle ferait son temps. Le père Cahill s’était levé et dérogeant aux règles en vigueur entre les murs s’était approché de la jeune femme et avait baisé son front. Puis il était parti. Wendy s’était toujours dit que c’était à lui qu’elle devait d’avoir été mise dans le bloc le plus sûr, de n’avoir jamais eu de trop graves ennuis. Comme si son aura sombré avait toujours flotté autour d’elle. Et l’enveloppe qui lui avait remise à sa sortie était assurément de lui. Les clés de sa Stingray, et les identifiants d’un compte en bitcoin.
« Ton père a compensé le temps. Mais ni lui ni toi ne pourrez jamais compenser l’amertume d’avoir été poignardée par celui à qui j’avais eu la faiblesse de m’attacher. la main d’Angus à son coeur qu’elle repoussa alors qu’elle persiflait Au moins j’aurais appris de cette erreur ci aussi !»
Elle aurait pu jubiler, même jouir de cet aveu qu’il lui faisait bien moins par les mots que par l’étoile triste qui scintilla un instant à son iris. Wendy avait rêvé de cet instant où ils se retrouveraient et où elle l’entendrait lui avouer sa faute. Mais, maintenant que cela était fait, elle n’en éprouvait pas la moindre satisfaction. Pas même la plus petite once… C’était même pire encore. Comme si l’aveu avait étouffé l’aire pour ne plus laisser que le vide béant. Ses paupières qui s’étaient closes et en un geste qui trahissait lui aussi bien des choses elle avait saisi la main d’Angus et l’espace d’un battement d’ailes de papillon elle y avait abandonné la sienne.
« Il faut croire que c’est pour cela que l’on conseille aux gens de réfléchir avant d’agir ?»
La brusquerie qui venait interrompre un pas de deux bien trop tendre pour ne pas en être dangereux. Elle s’était éloignée, s’occupant les mains à la cuisine pour ne pas laisser les tressaillements de son coeur l’assourdir à l’en rendre folle. Son couteau qui glissait sur les légumes pour mieux les trancher et à ses lèvres, comme à chaque fois qu’elle cuisinait, ses airs préférés qui s’invitaient. Il arpentait le salon, de son pas si maitrisé qu’il en paraissait calme quand elle savait qu’il repérait les lieux. Il avait beau être venu en ces lieux presque aussi souvent qu’elle, en connaître le moindre recoin, il lui fallait tout vérifier. Encore et encore.
« Au cas où tu craindrais que je ne sois venue accompagnée ou n’ait prévue de te faire exploser en cachant une bombinette dans les assises du canapé je te rassure il n’en est rien. ses gestes qui se suspendirent alors que son couteau virevoltait un instant dans les airs avant que de retomber dans sa paume Non pas que l’idée de t’éviscérer ne me soit pas venue mais si je dois le faire alors ce sera d’une lame. Plus élégant et je goûterai assez que ce soit la main que tu as toi-même formée qui t’arracher ton dernier souffle. »
Derrière la badinerie du ton c’était bien le sérieux qui fit luire le regard de la demoiselle avant qu’elle ne s’en retourne à la préparation de son dîner. Correction, de leur dîner. Les truffes émincées et qui exhalaient leur doux parfum, éveillant ses papilles et cette lamelle qu’elle glissait entre ses lèvres avant de venir l’offrir en une chose proche du baiser à celui qu’elle regarda sourcil haussé
« Eitan n’est pas aussi fou que nous nous plaisons à le croire. Il m’a permis de demeurer ici car il prétend que tu lui en aurais voulu de m’avoir laissée sans domicile fixe. Mais il m’a aussi clairement fait comprendre qu’il préférait -et je le cite “se faire couper les couilles et la bite” plutôt que de devoir se retrouvé mêlé à nos affaires. Et toi qui doutais qu’il eut atteint l’âge de raison !»
Le bleu de ses yeux tirait un peu plus vers le vert depuis la dernière fois où elle les avait vus. Les traits, sans s’affaisser, s’étaient un peu creusés sous l’œil et le bombé des joues était lui aussi plus affûté. Wendy savait. A quel point il avait regretté son geste et a quel point il avait retourné sa frustration sur autrui comme sur lui-même. De ce maelström de pensées comme d’émotions un antre était né. Le « Ring my Bell » de ce que n’avait pas manqué de lui rapporter Eitan. Une salle de boxe en apparences tout ce qu’il y avait de plus classique. Mais lorsque les lumières du jour disparaissaient alors celles du ring s’allumaient.
« C’est au Fight Club que tu t’es fait cela ? son regard glissait sur ces phalanges abîmées et qui portaient encore les stigmates de combats récents Fais attention à toi d’accord ? J’aime bien ta sale gueule.»
Aveu qu’elle enrobait de piques pour mieux en édulcorer la pourtant évidente tendresse. Wendy s’était détournée feignant de chercher des herbes fraîches à rajouter à leur dîner mais qu’elle ne trouva jamais bien qu’elles se trouvaient sur l’îlot central juste sous son nez. L’espace d’une seconde, heureusement bien courte, elle s’était sentie elle aussi responsable. De ce gâchis qui les avait amenés à une rupture qui était encore plus idiote qu’elle n’aurait pu le songer. Il l’avait piégée pour… SE PROTÉGER» … ? Alors qu’elle renversait le pot de cerfeuil elle grommela sans parvenir à éviter le regard d’Angus
« Sérieusement… Qu’est-ce qu’il y a chez moi de si effrayant que tu aies eu besoin de foutre des barreaux entre nous ?! posant le couteau entre ses mains et venant poser les fesses sur le rebord du meuble elle avait croisé les bras sur sa poitrine Je ne t’ai jamais avoir eu peur de quoi ni de qui que ce soit. Et pourtant nous savons toi et moi que des occasions il y en a eu plus d’une…»
Son regard s’était un instant détourné de lui pour mieux regarder le décor dans lesquels ils étaient devenus les comédiens malgré eux d’une pièce étrange où de leurs mots ils en faisaient tantôt une comédie de boulevard frôlant le ridicule tantôt une tragédie aux relents pathétiques. Les lieux étaient magnifiques, décorés avec soin et goût. La sobriété était de celle qui classent les êtres et sépare les élégants des parvenus. Mais elle était aussi, pour ceux à connaître les codes du Gotha, de celles qui hurlent à l’indécente opulence. Tout ici transpirait la réussite, l’argent et le pouvoir ! Mais ce n’était jamais que du décorum.
« Ça vaut la peine ? Tout ça ? Tout ce luxe qui te blase tant que tu ne prends même pas plaisir à le savourer ! Tout cet argent dont tu te fiches si bien que tu n’aimes même pas à le dépenser !»
Des pas qui se faisaient plus lourds alors qu’elle arpentait l’espace entre eux. Comme une marée qui s’en allait vers lui pour mieux le fuir ensuite. Roulement enivrant et assommant qui les avait amenés, ensemble, près d’une chose qui aurait pu être heureuse mais les avait tout aussi bien envoyés de fracasser sur l’écueil d’une malédiction qui ne disait pas son nom.
« Tout le monde court après quelque chose. La vérité. L’amour. La richesse ou la gloire. Tout le monde veut quelque chose. Mais toi… un soupir las qui vint embrumer la paroi de cristal de son verre Sais-tu seulement encore désirer quand tu crains si fort de rêver que tu fuis la moindre chance de vivre ? Autre chose, autrement … et les mots avaient jailli, plus terribles encore que tous les précédents et en effleurant le visage de l’irlandais de son souffle Comment peux-tu préférer la solitude à la vie ?!»
Aucun pouvoir ne valait cela. Aucune fortune non plus. Un seul des Cahill avait-il jamais imaginé que tout leur empire leur apporterait le bonheur ? Ils étaient assez riches pour tout acheter, corrompre qui ils souhaitaient ou presque. Mais ils étaient prisonniers. C’était ça que Wendy voyait alors qu’elle le tançait, le provoquait d’une manière qu’elle n’avait pas prévue et qui l’amenait sur la plus glissante des pentes. Un homme auquel elle s’était attachée, si sincèrement que cela l’agaçait rien que d’y songer. Mais un homme qui semblait tenir à ses chaînes là où elle avait fait se rompre chacune des siennes. Angus ne quitterait jamais ni son casino, ni ses affaires. Et elle comprenait. La famille était la plus précieuse des choses. Jamais elle ne pourrait s’imaginer aller à l’encontre des intérêts de Maximilien. Pourtant… pourtant elle était là, avec lui. Le mafieux, le criminel. Elle était là et avait souri en l’entendant venir la rejoindre dans la salle de bains. L’eau qui ruisselait à sa peau nue et à ses cheveux qui descendaient en cascades jusque dans son dos
« Dit ainsi j’ai de sérieux doutes sur la solution qui te plairait réellement elle avait ri avant que de passer sa tête hors de la cabine de douche et de tendre la main pour saisir un verre Est-ce que ce que tu vois t’a à ce point manqué ?»
Ouvrant, la porte en grand elle s’était adossée au chambranle de la cabine dévoilant les courbes incendiaires de son profil. Une lampée qu’elle dégustait avant de ramener son regard à lui.
« Peux-tu me passer mon peignoir s’il te plaît ? Ce sera quand même plus … propice à la concentration ? Du moins si tu veux réellement parler ? Sinon… Je dirais que tu es bien trop vêtu pour me donner la moindre envie de me mettre à genoux devant toi ?»
Elle avait ri puis s’était décollée de son perchoir et était venue elle-même prendre le duveteux vêtement qu’elle enfila. Elle s’était penchée et avant murmuré à son oreille
« Je ne mélange pas affaires et plaisir c’est aussi une leçon que je tiens de toi alors ne m’en veux pas de l’appliquer. dit elle avant que de retourner vers le salon son verre en main Dînons ! Parlons et négocions. elle avait haussé les épaules et conclu Si nous survivons à ce programme et si l’envie nous en prend alors … J’aimais nos étreintes. Pas toi ?»
Le chaud. Le froid. Le jeu.
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« Parce que nous sommes les seuls à vouloir vraiment croire à ces mensonges que l’on s’assène. »
Parce que lui, souvent, n’avait pas envie de donner corps à certaines vérités. Parce qu’il détestait donner à d’autres quelque pouvoir que ce soit sur sa personne. Il haïssait le fait de pouvoir être vulnérable. Mais ce faisant, peut-être qu’il la donnait, cette possibilité, qu’il se mettait à la merci d’autres. Il la fixait avec simplicité, par-delà le fossé qu’il avait lui-même creusé entre eux.
« Ce fut la seule fois… »
Mais cette unique occurrence avait suffi à renverser la vapeur, à déséquilibrer la balance. Il l’avait regardé porter la main à son cœur et une partie de lui aurait souhaité s’approcher d’elle, venir la soutenir et l’entourer, tout simplement, tandis que l’autre semblait ancrée au sol, enracinée dans le béton du bâtiment. Ce mur trouble de silence et de reproches entre eux, il l’avait bâti lui-même, il l'avait construit par sa fuite et son mensonge. Un sourire doux-amer avait étiré ses lèvres à la mention des fuchsias.
Dans cette chambre de Vegas où nous nous sommes aimés.
Les mots avaient accroché ses oreilles, son cerveau et jusqu’à son cœur qui se serra douloureusement un instant. Oui. Elle avait raison. C’était une vérité si simple qu’elle en était violemment douloureuse. Là, dans ce casino où ils avaient refusé de terminer leur partie, ils s'étaient aimés. Ils n’avaient pas voulu de gagnants ou de perdants dans cette histoire. Ils avaient laissé leurs gains à une employée qui n’en avait pas cru ses yeux. Ils en avaient ri avant de quitter les lieux. Ils s'étaient aimé avec une forme d'insouciance qu'Angus n'avait jamais connu avant, avec sincérité.
« Ça l’était. »
souffla-t-il. « Le langage des fleurs ne peut pas vraiment s’interpréter de travers. Il est si simple qu’il ne sait mentir… Et qu’il sait dire ce que je n’arrive pas toujours à exprimer. »
Un aveu qu’il souffla du bout des lèvres, d’un souffle aussi léger qu’un rêve. Une confession, presque timide. Totalement timide. Des mots qu'il avait retenus prisonniers de peur de les voir être trop vrais. Il ne put respirer normalement que lorsque la jeune femme détourna le regard. Toutefois, il ne pouvait s’empêcher de se fustiger de la situation. Mais qu’importe ce qu’il pouvait imaginer, il ne savait pas s’il pourrait un jour réparer le tort qu’il avait causé.
« Alors il le fait seulement si je ne suis pas dans les parages. »
Alastair n’avait jamais mâché ses mots en présence de son fils. Mais peut-être que son père avait su qu’il pouvait agir ainsi avec la jeune femme. Alastair se trompait rarement sur les gens. Le rire de la jeune femme avait apaisé l’esprit tourmenté de l’irlandais. Son palpitant avait fait un soubresaut quand elle s’était approchée pour saisir sa main et la poser là où il pourrait effleurer l’encre.
« Oh, je n’ose pas imaginer les qualificatifs qui ont pu lui échapper. »
Un léger rire lui avait échappé. Oui, cela ressemblait totalement à son père. Les traiter d'idiots - plus lui qu'elle sans doute. Ah comme il devait avoir envie de secouer son fils...
« Je crois pouvoir dire sans mal qu’il est des plus observateurs. »
Qu’il soit allé la trouver ne l’étonnait pas le moins du monde. C’était totalement le genre de chose qu’il pouvait faire. Même sans parler de la compensation financière. Alastair avait probablement voulu voir par ses yeux qui avait réussi l’exploit de déstabiliser son fils, au point de le faire agir de manière inconsidérée. Le patriarche Cahill veillait toujours au grain, qu’importe qu’Angus soit en âge de faire sa vie. De toute façon, Angus savait que son père ne manquerait jamais de faire sa petite enquête sur les personnes de son entourage.
Les mots plus que les actions de Wendy étaient une claque à son intention. Bien sûr, il savait que l’argent ne pouvait pas réellement compenser ce qu’il s’était passé. Non, ce qu’il avait fait. Mais qu’Alastair ait agi ainsi envers la jeune femme signifiait aussi qu’il avait vu quelque chose en elle qui avait retenu son attention. Une personne lambda n’aurait pas reçu de dédommagement de la part de son père. Et racheter les fautes du fils n’était pas vraiment un trait paternel. Il y avait autre chose. Angus en aurait mis sa main à couper sans sourcilier. Mais Alastair ne lui dirait rien, surtout pas s’il lui posait la question. Il ne pouvait qu’imaginer ou essayer de devenir les intentions paternelles.
« Assurément. C’est pour cela que les impulsifs s’attirent toujours des ennuis… »
Et font les pires erreurs. Wendy avait mis de la distance entre eux, cet ilot de cuisine qui aurait presque fini par ressembler à une bouée de sauvetage. Lui arpentait ce salon qu’il connaissait dans les moindres recoins. Malgré tout, il cherchait. Ce qui lui avait été volé. Ce qu’il avait perdu. Il aurait presque préféré qu’un piège l’attende en ces lieux. Cela aurait rendu les choses bien plus simples, n’est-ce pas ?
« Non, je n’attends pas vraiment une bombe. »
La revanche de la jeune femme ? Oui, il l’attendait. D’une façon ou d’une autre. Peut-être même qu'il l'espérait aussi. Qu'il voulait qu'elle le déteste, qu'elle le repousse... Autant qu'il désirait ardemment l'inverse. Il n’avait pas vraiment peur de ce qu’elle pourrait lui réserver. Il ne pourrait pas lui reprocher de vouloir se venger de ce qu’il avait fait.
« Mais une bombe te ressemblerait peu. Et ce ne serait pas assez personnel. »
Un coup de couteau, c’était plus personnel. Eviscérer quelqu’un, oui, ça demandait une forme d’implication. Cela demandait plus de force, au sens qu’il fallait réellement vouloir faire du mal à l’autre. Parce qu'elle ne le poignarderait pas dans l'ombre. Non. Si elle devait se venger, elle le ferait probablement en pleine lumière.
« Je n’en attendrai pas moins de toi. »
Un étrange sourire avait fleuri sur ses lèvres.
« Si je devais périr de la main de quelqu’un, j’aimerai autant que ce soit de celle d’une personne que j’estime et que j’ai assurément aimée. »
Et que j’aime encore.
Cinq mots qui ne purent franchir le seuil de ses lèvres mais qui semblaient toutefois flotter dans l’air entre eux. Oui, il n’avait jamais réussi à refermer cette page de son histoire. De leur histoire. Comme cette partie de poker jamais terminée.
Le délicat fumet de la cuisine de la jeune femme lui donnait faim. Le comportement de Wendy le déroutait. Ses fondations s’ébranlaient à chaque seconde et il devait presque se faire violence pour ne pas s’enfuir. Ce serait tellement plus simple. Mais cela ne lui ressemblait pas de fuir. Et il en était tout bonnement incapable. Après tout, il avait voulu venir jusqu’ici.
« Il ne prétend pas. »
Oui, si Eitan avait refusé d’aider Wendy en la logeant, il aurait eu des ennuis.
« Il savait que je ne lui aurais pas pardonné s’il t’avait laissé galérer à te loger. »
Son regard avait accroché un instant celui de la jeune femme.
« Pour une fois qu’il se montre raisonnable… »
avait-il ironisé.
Le regard de la jeune femme qui s’attardait sur ses traits. Pour le juger ? Pour chercher quelque chose en lui ? Il n’aurait su dire. Angus avait baissé les yeux sur ses phalanges abîmées en même temps que les siens. Il arqua un sourcil devant son aveu.
« Ce n’est rien. »
Il aurait pu dire tu devrais voir la gueule de l’autre sans fanfaronner, mais ce n’était pas ce qu’elle souhaiterait entendre. Il effleura les écorchures presque sans y penser. Il aurait voulu lui dire qu’elle s’inquiétait pour rien. Qu’il faisait toujours attention. Mais il ne pouvait pas, il ne voulait pas lui mentir. Parce qu’il ne cherchait pas à faire attention quand il montait sur le ring. C’était même l’inverse. Mais quelque chose lui disait qu’il valait mieux taire ce genre de réflexion. Même si elle l’aurait probablement lu dans son silence.
« La force avec laquelle tu as le don de faire battre mon cœur ? »
Il aurait voulu sourire ou grimacer, il ne savait pas trop. Le résultat devait être un rictus à mi-chemin entre les deux.
« Parce que je déteste perdre… Mais que pour toi j’aurais accepté la défaite. »
Et qu’il ne s’était pas senti capable de laisser tant de pouvoir à qui que ce soit. Il n’était pas certain d’en être capable. Enfin… Si. Pour elle, même à présent, il serait encore capable du meilleur comme du pire. Ces mots comme autant d’uppercut, de pointes qui l’égratignaient, qui l’écorchaient sur place.
« Je n’ai pas besoin de tout cela. »
Il l’avait toujours su, même sans le dire. Peut-être parce qu’il savait qu’il pouvait tout acheter, il ne désirait rien. Il se moquait de la richesse. Il se noyait dans son travail, dans le Fight Club, et surtout dans ce dernier, lieu où seuls les poings et la capacité à cogner comptait. Angus observait l’étrange ballet de Wendy.
« Les rêves disparaissent au petit matin... »
Alors autant éviter l’amertume de la réalité. Il ne répondit pas lorsqu’elle l’assassina de sa dernière question. Il n’avait pas de réponse. La solitude le protégeait. De lui-même essentiellement. Parce qu’il ne savait pas faire dans la demi-mesure. Parce que l’intensité du chaos d’émotions en lui, c’était juste trop, mais que le calme et le silence étaient peut-être plus effrayant encore. Mais il ne connaissait pas de mots pour décrire pleinement et justement ces mots, ces sensations.
Angus ne pouvait pas tourner le dos aux siens, son nom était son fardeau, mais il avait fait la paix avec cela depuis longtemps. Wendy se trompait. Il avait connu quelques étincelles de rêves. Parfois, il devait lutter contre ses impulsions qu’il taisait.
Il avait fini par la rejoindre dans la salle de bains, avec deux verres. Il dansait toujours sur la corde raide. Il aurait préféré une réponse plus définitive, plus tranchée.
« Je suis encore en train de me demander si c’est réel ou si on m’a cogné trop fort sur le crane et que je suis en train d’imaginer tout cela. »
Il l’avait regardée, effleurant ses courbes du regard, ce profil qu’il n’était jamais parvenu à sortir de son esprit.
« Pas uniquement ce que je vois si je dois être parfaitement honnête. »
Il avait bu une gorgée de son verre, pour se donner contenance. Mais peut-être que les propos de la jeune femme avaient fait monter le rouge à ses joues. Il se retint de jurer. Elle battait si bien le chaud et le froid qu'il allait finir par ne plus savoir où il habitait.
La partie n’était pas finie, après tout.
C’était elle qui avait la main.
Mais peut-être qu'il cachait encore une carte dans sa manche.
« Cela dépend. Tu veux que l’on parle affaire ou plaisir ? »
Il cherchait à garder contenance. Il aurait pu oublier ce qui l’avait amené en ces lieux. Il se secoua légèrement. Il lui emboita le pas.
« Je les aimais tout autant. »
Trop, même, probablement. Il laissa échapper un soupir.
« J’avais oublié à quel point ta cuisine aiguises mon appétit. »
Il laissa échapper un léger rire.
« Eitan doit vraiment se marrer en nous imaginant à l’heure actuelle. »
Il sortit son téléphone de sa poche et l’éteignit avant de le ranger à sa place.
« Juste toi et moi, ce soir. Si cela te convient ? »
Il ne rallumerait pas son téléphone avant la fin de leur soirée. S’il y avait un problème au Casino, Eitan saurait s’en débrouiller. Quoi qu’il se passe ce soir-là, il ne voulait pas que le monde extérieur vienne les interrompre. La situation avait presque un goût de déjà-vu. Cela aurait pu, s’il n’avait pas tout bousillé.
« Je propose que l’on dîne avant d’attaquer la partie qui fâche ? »
Il avait impulsivement tendu la main pour caresser la joue de la jeune femme du bout des doigts. Si ce n’était qu’une hallucination due à une commotion – ce qu’il ne croyait pas une seconde – elle était bien trop réaliste.
« J’aurais dû apporter le dessert en plus des fleurs. »
L’idée d’avoir une conversation normale avec la jeune femme était plus que tentante. Il voulait bien essayer. Il n’oubliait pas le but initial de sa visite. Mais il avait envie aussi de voir quelle serait l’issue de cette partie. Il eut un léger sourire avant de sortir de sa poche un jeton, jumeau de celui qui ne le quittait jamais. Il le posa sur la table avant de le faire glisser vers la jeune femme. Il ne doutait pas qu'elle le reconnaisse.
« Tu relances ? »
Dans la vie, tout est fortuit, sauf le hasard, pas vrai ?
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Angus Cahill était né avec tant que même le tout ne semblait plus avoir de sens. L’argent facile et peu importait qu’il ne soit pas des plus propres. Le nom qui forçait le respect et tant pis si celui-ci naissait de la peur que sa famille abandonnait dans son sillage comme les plus létales des notes. L’amour, pas toujours des plus sincères et jamais pérenne de ces hommes comme de ces femmes dont il culbutait les corps pour mieux oublier qu’il se contrefichait de leur cœur. Quand les désirs n’ont plus même à s’énoncer pour devenir réalité alors que peut-on faire encore attendre de l’existence ? Elle. C’est elle que l’irlandais attendait sans même oser se l’avouer. Wendy avait balayé toutes ses certitudes, fait s’écrouler avec plus de facilité encore la moindre de ses lignes de défense. Elle était surtout cette femme qui lui avait fait éprouver, pour la toute première fois de son existence, la peur. A moins que ce ne soit les peurs, avec leurs mille et un possibles et impossibles, leurs litanies de questions. Les pires d’entre toutes car elles ne trouvent jamais de réponse.
« L’on dit que le plus grand des trésors dans la vie est la liberté de choisir. le regard qui se relevait pour mieux venir sonder son homologue masculin L’on dit aussi que le plus rare des trésors est de trouver l’être qui saura vous aimer inconditionnellement et au point d’embrasser vos défauts plus encore que vos qualités.»
Le bruit du briquet et la lueur rouge au bout de la cigarette. Un nuage de fumée qui s’échappa des lèvres comme figées dans leur moue boudeuse. Et le verdict qui tombait alors qu’un doigt, aussi unique que le mensonge de l’homme, se dressait.
« Tu avais tout cela.»
Wendy s’était tue, ne lui faisant pas même l’aumône d’un sermon dont elle avait pourtant le secret. Même son ton, toujours si éloquent, s’était fait morne et placide. Métaphore d’un cœur qui avait tant soupiré qu’il avait fini par en crever. Oraison d’un amour parti trop tôt. Funérailles d’un bonheur si tangible que l’homme que beaucoup pensaient immunisé contre la peur avait préféré verser dans la lâcheté la plus primaire et s’enfuir. Non, pire : la trahir. Rien qu’au souvenir elle sentit la fureur se réveiller à son échine. Et même le souvenir pourtant bien tendre de ces nuits où la fureur n’avait été que dans leurs baisers gloutons et leurs étreintes si ardentes que la jeune femme en avait senti le souffle fantomatique à sa peau bien des jours après, même cela ne pouvait aujourd’hui lui faire oublier la bile amère qui remontait à sa gorge.
« Si tu n’étais pas un aussi bon menteur j’aurais presque pu me laisser amadouer par ton trop beau laïus là… la langue qui claquait à son palais et son regard qui se faisait plus acéré encore tandis que son minois se froissait Mais non seulement le romantisme dégoulinant ne te sied pas le moins du monde mais… le couteau qui ne quitta sa paume que pour mieux voler en direction de l’homme dont il lécha la pommette de sa lame Je préfère crever ici et maintenant que de te faire de nouveau confiance.»
Si elle ne trouvait pas cela dégoûtant sans doute lui aurait-elle craché son mépris à la figure. Mais même cela eut été lui démontrer bien trop d’intérêt. Angus ne méritait pas même ça ! Tout comme il ne méritait pas une haine toujours trop proche de l’amour pour que la blonde ne s’en méfie pas. Mais elle l’avait vue. Cette étincelle d’étonnement qui avait lui aux prunelles de son ancien amant quand Alastair s’était invité dans la conversation. Le patriarche. Celui qui avait toujours su gérer le clan avec une telle main de fer que même son fils en avait pâti. Angus ne l’avait jamais admis ouvertement mais l’ombre de son père s’était plus d’une fois montrée écrasante. Difficile de marcher dans les pas et l’ombre d’un tel homme. Wendy n’oublierait jamais les rares fois où sa route avait croisée celle d’Alastair. Ce charisme dont son fils avait hérité et qui fascinait autant qu’effrayait. Le feu et la glace unis en un seul être. Un mélange qui continuait, pour son plus grand désarroi, de la faire chavirer.
« Une question me taraude mais peut-être pourras-tu m’apporter une réponse : l’incapacité à assumer vos sentiments est-elle propre aux mâles ou est-ce simplement une tare génétique familiale ?»
Les mots fusaient, claquaient dans l’air pour mieux exploser d’une colère encore bien pâle. Mais Wendy ne pouvait s’empêcher d’en revenir à ces mots que l’irlandais avait prononcés quelques instants plus tôt. Ils étaient les seuls à croire à leurs mensonges si énormes qu’ils en étaient grossiers. Elle, du moins, ne l’étaient assurément pas des siens. Elle n’aboyait que pour ne pas ronronner. Elle attaquait pour ne pas laisser son impassibilité s’effriter encore plus vite. Mais au plus elle crachait son fiel et sa rancoeur au plus elle sentait le sang affluer à son cœur.
« Tu nous entends ? avait elle finalement soupiré, presque lasse, et regardant leurs silhouettes toujours trop proches se dessiner sur la surface miroitante du réfrigérateur Tu nous vois ?»
Deux ombres errant sous les lumières éclatantes de cette cuisine, de ce salon… De cette vie que beaucoup leur enviaient mais qui n’était pour eux qu’une farce grotesque et indigeste.
« Comment avons-nous pu en arriver là Angus ? Comment ? une pause et la question ultime qui tombait, résonnant avec le plus ironique voir sarcastique des échos entre eux Je ne sais pas pour toi mais je vomis ce que je vois. son ongle qui suivait les contours de leurs images si floues qu’elles en paraissaient délavées par le temps Ce n’est pas nous. Je refuse que ce soit nous ! »
Ces gens qui ne savaient que palabrer, se perdre en rondeaux de mots pour mieux éviter ce qui avait toujours été au cœur de leurs ennuis. De ce qui en avait été la cause. De ce qui pourrait aussi en être la solution ? Qui savait… Le cœur à ses raisons … Wendy en aurait bien ri si cela ne lui avait semblé si pathétique. Elle les connaissait ! Trop bien pour supporter de les voir se trahir ainsi. Se trahir eux-mêmes. Trahir ce qu’ils avaient été. Eitan ? Elle appréciait énormément l’homme et lui serait à jamais reconnaissante pour l’avoir ainsi hébergée et aidée quand elle en avait le plus besoin. Mais en cet instant précis il aurait pu mourir écrasé par un tracteur qu’elle s’en serait éperdument fichue. Tout comme elle se foutait de ce repas qu’elle n’avait préparé que pour mieux se donner de la contenance et feindre une normalité dont elle se lassait. Même leurs échanges, aussi délectables soient ils finissaient par ressembler à un Ouroboros épuisé.
« Je n’ai jamais aussi bien joui qu’entre tes bras et en te sentant entre mes reins. avait-elle dit dans un sursaut de sincérité alors qu’il l’avait rejointe dans la pièce d’eau Et à en juger par ton regard -mais pas que- il semble des plus évidents que je ne suis pas la seule à qui nos ébats manquent.»
Les lèvres de la blonde qui s’étiraient tandis que ses iris s’attardaient sur la preuve évidente du désir qu’elle inspirait à celui qui, d’ailleurs, ne s’en cachait pas. Mais les mots qui s’évadaient des lèvres de son impossible venaient piqueter à l’en éveiller bien plus encore qu’un simple désir. Cela lui manquait. Leurs joutes oratoires. Leurs envies de baiser comme si demain ne devait jamais exister. Leurs projets aussi.
« Nous ne pouvons pas.»
Sa tête qui se secouait comme pour mieux réfréner ses envies et la bouteille de vin qu’elle s’en allait chercher pour mieux les servir. A sa joue la chaleur des doigts de l’irlandais. A son cœur la douleur d’une histoire qu’elle refusait de voir se réitérer. Non !
« J’accepte cependant les termes du contrat. son telephone qu’elle éteignait elle aussi et un sourire Rien que toi et moi. Et les affaires attendront bien le dessert. un verre qu’elle finit avant de le reposer et de se lever. Quelques pas pour venir à lui et déposer à ses lèvres le souffle des siennes. Mais pour notre sécurité a tous les deux je vais aller m’habiller. Ce sera plus sage tu ne penses pas ?»
En tous cas, elle, avait besoin de cette illusion de garde fou. Comme si l’étoffe d’une robe pouvait suffire à la préserver de ses propres démons ! Des secondes qui se firent minutes. Un cœur qui s’apaisait avec l’éloignement. Et une robe en soie blanche qu’elle enfilait. Sagement ? Son dos nu descendant jusqu’à la chute de ses reins et son tissu assez transparent pour suggérer ses courbes semblaient témoigner de son indécision. Voir de son hypocrisie. Certainement de son hypocrisie.
Des plats préparés avec bien plus d’amour qu’elle ne voudrait jamais le concéder et qu’elle leur servait comme elle aimait à le faire avant. Encore une piqûre de rappel d’une vie qui avait été leur et qui lui manquait. Dans toutes ces myriades de détails qui en faisaient la saveur mais dont elle n’avait saisi l’importance que lorsqu’elle les avait perdus. Encore une plaie béante à son cœur, une épine à son âme.
« J’étais enceinte. Quand tu m’as trahie. Je portais ton enfant.»
La voix qui se brisait et les doigts qui se crispaient si fort sur le verre que celui-ci s’en brisa. Une étoile coupante venant lacérer les chairs et faire perler le sang.
« Rassure-toi : tu n’es pas père.»
Son regard qu’elle ramena à celui de l’irlandais. Ses lèvres scellées par une douleur blême. Et les mots qu’elle ne dirait pas.
Que le chagrin avait provoqué sa fausse couche.
Qu’elle ne lui pardonnerait jamais.
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Angus pensait le plus souvent la vie comme une partie d’échec. Chaque action avait un but, était mûrement réfléchie… Sauf lorsqu’il s’agissait de la jeune femme qui lui faisait face. Wendy déclenchait chez lui des réactions qui lui faisaient perdre contenance, qui venaient fracasser ses certitudes pourtant bien ancrées à son âme. Et rarement s’était-il retrouvé aussi à nu devant quelqu’un. A vrai dire, il n’était pas certain de s’être dévoilé autant à quelqu’un d’autre que Wendy. Là, dans cette pièce, il était incapable de réellement détourner le regard de la jeune femme. Elle l’attirait, au sens le plus primitif du terme.
« Crois tu que je l’ignore ? »
Ses yeux s’étaient un instant concentrés sur la lueur incandescente de la cigarette.
« Crois-tu que je ne sais pas à quel point le bonheur m’a brûlé les doigts ? »
Oui, il avait eu peur de la force de ses sentiments. De cette jeune femme en apparence bien plus frêle que lui et pourtant d’une certaine manière, immensément plus forte que lui. Il ne cilla même pas lorsqu’elle lança le couteau, si près de lui qu’il en sentit la brûlure à sa peau. En cela aussi, Wendy lui tenait tête plus que n’importe qui d’autre n’avait jamais osé jusque-là. Et puis, il avait fallu que son père s’invite dans la conversation. Aujourd’hui encore, Angus ne savait pas exactement ce qu’il ressentait pour son paternel. Un savant mélange d’amour et de crainte sans doute. Alastair et lui étaient bien trop semblables pour pouvoir s’entendre. Le père avait voulu façonner le fils à son image et il avait très probablement réussi.
« Je ne pourrais pas parler pour les autres. Mais pour moi, je dirais que ça fait partie, effectivement de mes tares. »
Tout enfermer dans un tiroir et tenter de faire comme si de rien, prétendre ne rien éprouver plutôt que d’affronter ce qui l’aurait réellement mis en danger. Il savait désormais, quelle erreur cela avait été.
« Plus clairement que je ne nous ai jamais vus ou entendus. »
Deux ombres qui courraient après un passé encore bien proche et pourtant diablement loin. Une main qui venait danser dans ses cheveux un instant, ébouriffant ses courtes mèches blondes et donnant, en quelque sorte, un air vulnérable à Angus Cahill. Des mots qui pourtant n’étaient pas faits pour aller ensemble.
Il était d’accord avec elle, il ne voulait pas se complaire en mots. Trop avaient été dits. Mais quelque chose encore l’empêchait d’agir, une retenue aussi peu familière que sa vulnérabilité face à Wendy. Il l’avait rejointe dans la salle de bains.
« Je n’ai jamais été aussi entier qu’avec toi. »
Des vestiges de moments de bonheur volés qui s’invitaient à sa mémoire. Oui, il se souvenait, en son esprit et en son corps. Ce n’était pas qu’une question de baise, même si bon sang, il n’avait clairement jamais aussi bien joui qu’avec elle. Il avait envie de pulvériser les dernières barrières entre eux. Elle lui glissait entre les doigts. Elle le brûlait de son absence. Le manque d’elle était pire encore que le manque de drogue. Il fut heureux qu’elle accepte son offre.
« Nous et sage dans la même phrase... »
Même emmitouflée dans dix couches de vêtements, il aurait eu du mal à en pas se sentir attiré par elle. Et la tenue choisie par la jeune femme ne l’aidait clairement pas. Et l’apparente normalité de la situation n’en était que plus cruelle aux yeux de l’irlandais. Chaque geste avait l’amertume de ce passé qu’il avait totalement et irrémédiablement gâché.
Son cœur avait volé en éclats en même temps que le verre s’était brisé entre les doigts de Wendy. La sidération avait cueilli Angus comme un poing en pleine gueule. Comme hors de lui, il s’était vu saisir la main blessée de Wendy pour en oter les échardes translucides et désormais teintées de vermeil.
J’étais enceinte.
L’écho de ces mots qui se cognaient sous son crane.
Tu n’es pas père.
La glace en son cœur qui se brisait et qui crevait l’organe de ces échardes acérées.
« Je... »
Les mots qui se dérobaient à la langue de l’acerbe bonimenteur. Et, pour la première fois depuis bien longtemps, il ne se retrouva qu’à simplement être Angus, l’homme derrière l’impitoyable machine.
« Je te présente mes excuses. »
En une sincérité qu’il n’avait jamais eu pour d’autres. Même s’il n’espérait aucun pardon – il n’en méritait pas la moindre once. Il s’était levé un instant, le temps d’aller chercher la trousse de secours qu’il savait trouver dans la salle de bains – Eitan ayant toujours été du genre prévoyant. Il avait été étonné de voir de l’émotion dans son regard lorsqu’il avait croisé son reflet dans la glace. Il s’était empressé de retourner auprès de Wendy pour nettoyer ses plaies et les bander. Les plaies physiques, seulement. Les autres… Il n’était pas certain que Wendy le laisse s’en approcher, ni qu’il puisse réellement y faire quelque chose. Mais merde, plutôt crever que de ne rien tenter.
« Rien de ce que je pourrais dire ou faire ne pourra jamais effacer ce que j’ai causé. »
Angus Cahill … enfant et père du Chaos.
« Mais s’il existe un moyen de me racheter, je le trouverai. »
Et si cela devait s’avérer être la dernière action d’Angus Cahill sur cette Terre alors il en serait ainsi.
« Pour ce que cela vaut, ma vie t’appartient. »
Une vie pour une vie, cela lui paraissait logique, à celui qui vivait par l’adage un œil pour un œil. Oh comme il pouvait se mépriser de sa lacheté et de tout ce qu’elle lui avait couté. Leur avait couté.
« Est-ce que je peux te demander quand ? »
Quand elle avait su. Quand c’était arrivé. Tout ce qu’elle voudrait bien lui dire. Il aurait voulu pouvoir la décharger de ce fardeau douloureux.
Il n’avait pas lâché sa main depuis qu’il avait fini de la bander. Il n’en était pas capable.
Il ne se pardonnerait jamais.
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