together we are stronger
feat.   @Niall O'Malley   

« Nous comptons sur vous. Tout doit être fin prêt pour quinze heures les amis de notre fils arrivant pour le goûter.»

Une poignée de secondes pendant lesquelles le regard de la blonde s'en alla chercher le mouvement de balancier, si régulier qu'il en devenait apaisant, du métronome posé sur le Steinway. Installé sur son petit tabouret tendu de velours capitonné bleu roy Phileas travaillait ses arpèges. Le doigté était agile bien que plus agité que d'ordinaire. Artemisia avait souri avec une tendresse qui lui allait à ravir bien qu'elle ne se l'autorise que dans ces rares moments où elle cessait d'être une femme publique pour n'être plus qu'une mère comblée. Elle venait tout juste de recevoir les dernières confirmations de leur traiteur pour l'anniversaire de leur petit pianiste en herbe, son doigt encore posé sur l'écran de son portable quand le crissement des pneus sur les graviers de l'allée fit se figer l'enfant. Un coup d'œil à l'horloge numérique de la  box et les commissures des lèvres du petit s'étaient étirées en un sourire enjoué.

« Papa !»

Elle aurait voulu lui conseiller de modérer son enthousiasme, de faire preuve d'un peu plus de retenue. La femme du monde l'aurait fait. Pas la mère. Je u contraire cette femme ci adorait voir leurs enfants aussi remuant, gorgés de ces rêves et de ces envies que l'existence se chargerait bien assez tôt de ternir quand elle ne les déchiquèterait pas. Phileas fêterait demain ses sept ans. Cet âge où, déjà, on le félicitait d'atteindre cet âge dit de la raison. Hier quand sa grand-mère paternelle l'avait appelée pour lui demander ce qu'il souhaitait recevoir comme cadeau elle en avait profité pour lui demander ce que cela lui faisait d'être un "grand". Elle lui avait même demandé s'il avait déjà des idées de ce qu'il voulait faire plus tard. Artemisia se souvenait d'avoir roulé des yeux d'agacement. Si vite que la tête lui en avait tourné. Leur fils était encore un enfant et elle entendait bien qu'il le demeure encore longtemps !

Niall et elle avaient grandi pour devenir des monstres pétris de mille et une ambitions et de bien moins de scrupules. Ils avaient réussi. Obtenu bien plus que ce qu'ils avaient jamais osé rêver. Mais quand elle voyait son époux soulever leur fils de terre pour mieux le faire tournoyer dans les airs avant que de le serrer sur son coeur elle se demandait si tout cela, tous ces sacrifices en valaient la peine. Oui. Car si leurs ambitions respectives comme communes leur avait grignoté plus d'un lambeau d'humanité au point qu'ils riaient souvent de leur damnation annoncée leur alliance avait permis de donner naissance à leurs plus belles réussites : leurs enfants.

« Il piaffait d'impatience de te voir rentrer.   avait-elle dit tout en venant à deux des hommes de sa vie. Le plus petit avait arraché la promesse à son père de lui consacrer la journée de demain puis s'en était retourné à sea blanches et ses noires. Les notes s'élevaient quand Artemisia avait laissé ses bras se pendre au coup du plus grand Je t'autorise à ne penser qu'à notre fils demain si cette nuit tu n'as d'yeux que pour moi.»

Un téléphone qu'elle entendit vibrer à la poche intérieure du cuir de son époux. Un soupir de réprobation qu'elle commençait déjà à pousser quand son propre téléphone sonna depuis les profondeurs de la poche arrière de son jean. Un rire, bref et désabusé, qui lui échappa alors qu'elle se saisissait de son smartphone et rejetait l'appel. Sans même avoir regardé l'appelant. Elle ne faisait jamais cela. Véritablement jamais. Mais ce soir elle se découvrait des velléités d'autre chose.

« Et si nous emmenions les garçons manger au McDo ? Ensuite nous pourrions aller faire un mini golf ? Ou même les emmener à la salle d'arcades ?»

Ça non plus ils ne le faisaient jamais. Raison de plus pour se lancer. Il ne faut jamais être esclave de ses habitudes.